Par jugement du 9 octobre 2018, le Tribunal de Grande instance de Paris a estimé que :
« La Fondation du Judaïsme français n’est nullement citée au testament litigieux de sorte qu’il ne peut « être considéré que les termes susmentionnés la désignent fut-ce en qualité de fondation abritante.
« C’est donc nécessairement comme visant à la création d’une fondation autonome avec effet rétroactif
« au jour du décès, comme le permet l’article 20 de la loi n° 87–571 sur le développement du mécénat, que
« le testament doit être interprété.
« Or, il n’a pas été procédé à la création d’une telle fondation dans le délai d’un an prévu par le texte.
« Par suite, le légataire est inexistant et le legs doit être déclaré nul. »
(Tribunal de Grande instance de Paris, 9 octobre 2018, Fondation du Judaïsme français c/ Mme Miyazaki, n° 15/18233).
Un particulier avait par testament, disposé en faveur d’une fondation nommée dans l’acte, à créer après son décès, comme le permet la loi n° 87-751 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, aux termes de son article 18-2.
Mais une telle faculté n’est ouverte qu’à la condition que la Fondation « obtienne, après les formalités de constitution, la reconnaissance d'utilité publique », la demande de reconnaissance d'utilité publique devant, « à peine de nullité du legs, être déposée auprès de l'autorité administrative compétente dans l'année suivant l'ouverture de la succession ».
Ces conditions, d'ordre public, n’avaient pas été respectées en l’espèce.
En effet, le Notaire chargé de la succession avait cru pouvoir choisir non de déposer un dossier de reconnaissance d’utilité publique de la fondation à créer, reconnaissance emportant création d’une fondation disposant de la personnalité morale, mais d’approcher La Fondation du Judaïsme Français, non mentionnée dans le testament à quelque titre que ce soit, pour signer une convention de création en son sein d’une fondation dénuée de personnalité juridique, constituée d’un simple compte affecté, comme le permet également en principe, la législation.
Toutefois, le testament n’ayant nommé aucune fondation « abritante », le Tribunal a annulé pour ce motif le legs qu’il contenait en faveur de la fondation.
Il a, en cela semblé implicitement admettre la possibilité de créer par testament une fondation dénuée de personnalité juridique, à la condition que le testament désigne la fondation abritant une telle « fondation ».
Le Tribunal semble bien, en cela, être revenu sur l’obligation, posée par la Cour de cassation, de la création d’une personne juridique ad hoc, pour pouvoir fonder par testament.
La Cour de cassation avait, en effet estimé qu’un legs peut être effectué au profit d’une fondation à créer, mais sous réserve que ladite fondation acquière la personnalité morale, que ce soit par décret de reconnaissance d’utilité publique, nécessaire en France, ou par tout autre acte à l’étranger, par exemple par inscription au registre des sociétés de Genève, en l’espèce (Cass civ 1, 15 avril 2015, n° 14-10661, Bulletin 2015, I, n° 93).
La rédaction l’article 18-2 de la loi de 1987 est sans équivoque : « Un legs peut être fait au profit d'une fondation qui n'existe pas au jour de l'ouverture de la succession sous la condition qu'elle obtienne, après les formalités de constitution, la reconnaissance d'utilité publique ».
Il eût donc été nécessaire qu’« elle » c’est-à-dire la Fondation à créer, ait obtenu pour elle-même la reconnaissance d’utilité publique, ce qui n’était pas le cas dans la présente espèce.
Telle n’est pas la solution retenue par le Tribunal de grande instance de Paris, qui s’est fondé exclusivement, pour constater la nullité du legs, sur la circonstance que la fondation abritante pressentie n’est pas citée dans le testament, ce qui aurait constitué un legs à personne incertaine, traditionnellement nul en droit français.