La transformation directe d’un GIP en une personne morale de catégorie différente est possible dans son principe

 

A titre général, une personne morale peut se transformer en une personne morale d’une autre catégorie et ce, même sans que la loi ou un règlement l’aient prévu.

La loi prévoit, certes souvent, expressément la possibilité pour une personne morale de se transformer en une personne morale d’une catégorie différente.

C’est par exemple ainsi que l’article 83 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, a inséré dans la loi du 23 juillet 1987 relative au développement du mécénat, un article 20-2 ainsi rédigé :

 « Art. 20-2.-Une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association peut être transformée en une fondation reconnue d'utilité publique sans donner lieu à dissolution ni à création d'une personne morale nouvelle. »

 De même, un Fonds de dotation (équivalent d’une fondation a minima) peut se transformer directement en Fondation sans création d’une personne juridique nouvelle, en application des dispositions de l’article 140 nouveau de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (loi dite « LME »), ainsi rédigé :

 « XI.- Le fonds de dotation peut être transformé en une fondation reconnue d'utilité publique par décret en Conseil d'Etat, sans donner lieu à dissolution ni à création d'une personne morale nouvelle. »

Ces dispositions nouvelles n’ont fait, en définitive, que consacrer une pratique d’ores et déjà en cours et acceptée par le Conseil d’État, par exemple dans le cadre de la transformation de l’Association hospitalière du Prado (Marseille) en Fondation reconnue d’utilité publique dite Fondation Hôpital Saint-Joseph (cf décret du 10 septembre 1984 par exemple). 

Ainsi, même sans texte, dans le silence de la loi, la Jurisprudence a admis la possibilité pour une personne morale, de se transformer directement en personne morale d’une catégorie différente.

 

S’agissant des GIP, un texte prévoit expressément cette possibilité : la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, qui fixe en son chapitre II, les règles générales applicables aux groupements d'intérêt public, dispose en son article 101 :

« La transformation de toute personne morale en groupement d'intérêt public, ou l’inverse, n'entraîne ni dissolution ni création d'une personne morale nouvelle au regard des dispositions fiscales et sociales. »

Par ces termes « ou l’inverse », la loi mentionne expressément la possibilité de transformation directe d’un GIP en une autre structure juridique.

Il n’en reste pas moins que l’on ne trouve pas d’exemple de GIP s’étant transformé en organisme de droit privé, même (et nécessairement) non lucratif.

La question reste ainsi ouverte

Il semble qu’il fut envisagé en septembre 2016 la transformation d’un GIP (l’Institut National du Cancer, INCA) en association, organisme de droit privé, mais apparemment sans que la démarche n’ait été poursuivie, en l’état actuel de nos informations.

De fait, plusieurs difficultés peuvent surgir quant aux modalités d’une transformation d’un GIP en personne morale de droit privé.

 

La transformation d’un GIP en personne morale de droit privé nécessite des conditions de fond et un formalisme contraignant notamment sur le régime des biens et sur la comptabilité

 

La transformation d’un GIP en Fondation ou autre personne de droit privé, peut être décidée par les responsables ou parties contractantes à la Convention constitutive du GIP, ce qui nécessite un nouvel Avenant en ce sens le plus souvent approuvé par arrêté ministériel.

Toutefois, différentes questions peuvent se poser sur la possibilité et les modalités d’une telle opération.

Certains éléments ne posent pas de problème particulier, s’agissant notamment des activités et des personnels

 

Sur les activités et leur financement

Les activités d’un GIP relèvent généralement du service public.

Ces activités peuvent donc être menées par une personne privée chargée d’une mission de service public qui se substituera au GIP.

Une nouvelle Fondation pourra ainsi reprendre les catégories d’activités d’un GIP, en application des stipulations de sa Convention constitutive.

 

Sur les personnels

La Convention constitutive du GIP mentionne généralement la présence de personnels de droit privé, en conformité à l’article 109 de la loi du 17 mai 2011 qui dispose :

« Sous réserve des dispositions relatives à la mise à disposition prévues par le statut général de la fonction publique, les personnels du groupement ainsi que son directeur sont, quelle que soit la nature des activités du groupement, soumis, dans les conditions fixées par la convention constitutive, aux dispositions du code du travail ou à un régime de droit public déterminé par décret en Conseil d'Etat. »

Les personnels d’un GIP avant transformation pourront donc rester régis par le Code du travail, à l’exception des personnels publics détachés ou mis à disposition.

 

D’autres aspects peuvent poser problèmes et méritent une attention particulière

Il s’agit généralement des biens, actifs matériels ou financiers du GIP

A titre général, une imprécision persiste quant au régime applicable aux biens des GIP : si l’on se fie à l’article L. 2 du Code général de la propriété des personnes publiques, celui-ci étend le champ d’application de ce Code « aux biens et aux droits, à caractère mobilier ou immobilier, appartenant aux autres personnes publiques dans les conditions fixées par les textes qui les régissent », dispositions qui paraissent ainsi applicables aux biens des GIP.

Or, ces règles prévoient notamment l’inaliénabilité des dotations (capital) des personnes publiques, ce qui ne permet pas de transfert à une autre structure juridique. Même si en cas de transformation directe, nécessairement sans dévolution, cette inaliénabilité n’est plus opposable, il faut se demander si le régime de ces biens permet une telle « privatisation ».

A titre d’exemple, les considérations qui suivent paraissent pouvoir permettre d’échapper aux règles des finances publiques.

 

a)     Tout d’abord, si le GIP n’a pas été doté de capital public initial, comme le permet l’article 104 de la loi du 17 mai 2011 qui dispose :

 

« Le groupement d'intérêt public est constitué avec ou sans capital.

« Les droits de ses membres ne peuvent être représentés par des titres « négociables. »

 

De fait, la circonstance que la Convention constitutive du GIP mentionne qu’il est constitué sans capital, écarte a priori l’existence d’une dotation publique inaliénable ou intransformable en dotation privée.

 

b)     En outre, si les actifs repris initialement par le GIP ont pour origine des transferts provenant de la dévolution des biens d’une personne privée, il est dès lors possible de les faire échapper aux contraintes de la propriété publique.

 

Ces biens n’ayant pas été capitalisés, doivent donc pouvoir être privatisés à l’occasion de la transformation statutaire.

 

c)     Certes, la question reste moins certaine s’agissant des reports à nouveau que peuvent faire apparaître les bilans et comptes de résultat du GIP et dont on peut s’interroger sur le caractère public ou privé, compte tenu de leur origine.

 

A cet égard, il semble bien possible qu’un tel report à nouveau, ainsi que les actifs apparaissant au bilan du GIP, puissent ne pas être considérés comme provenant de fonds publics.

Ainsi au cas où la principale source de financement annuel du GIP se compose d’une subvention annuelle de fonctionnement provenant d’une personne morale de droit public et qui n’a pas vocation à financer des investissements inscrits à l’actif du bilan du GIP et au plus fort si ces investissements ont été financés en partie par le transfert initial d’actifs en provenance d’une personne privée et en partie par autofinancement à partir des produits de rétribution des services rendus, recettes à caractère marchand, lorsque ceux-ci atteignent une importance suffisante chaque année, ce qui en quelques années pourront suffire à financer la partie non transférée initialement, des équipements du GIP.

Au plus fort en cas d’absence de subventions d’équipement de l’Etat ou de personnes publiques, les sommes reçues de ces derniers étant supposées avoir été intégralement consommées en fonctionnement pour l’accomplissement de la mission de service public du GIP, celui-ci conservant donc des fonds propres susceptibles d’être « privatisés » par transformation en Fondation, ce que le Conseil d’Etat, saisi d’un projet de décret de reconnaissance d’utilité publique, ne manquera pas d’examiner.

Au cas contraire, il conviendrait, à l’occasion de la transformation du GIP en Fondation, de restituer un reliquat de fonds propres à l’organisme public lui ayant précédemment accordé des subventions de fonctionnement.

Il conviendra en outre, de procéder à d’autres modifications de la Convention constitutive.

 

d)     En effet, la Convention peut prévoir que la comptabilité du GIP reste une comptabilité publique insusceptible d’être celle d’une Fondation, organisme privé.

 

A cet égard, même si la loi de 2011 prévoit en son article 112 que « La comptabilité du groupement est tenue et sa gestion assurée selon les règles du droit privé » ce n’est que « sauf si les parties contractantes ont fait le choix de la gestion publique dans la convention constitutive ou si le groupement est exclusivement constitué de personnes morales de droit public soumises au régime de comptabilité publique. »

En l'espèce, la Convention constitutive d’un GIP peut prévoir au contraire une tenue des comptes « assurée en vertu des dispositions du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique … »

Soit une comptabilité relevant du droit public.

Il sera dans ce cas préconisé de modifier ce point par avenant, pour « privatiser » le patrimoine du GIP, ce qui se justifiera, puisqu’un caractère public de la comptabilité non seulement n’est plus de droit aujourd’hui, mais doit être selon la loi, l’exception et non la règle

La privatisation de la comptabilité du GIP sera d’autant mieux possible que l’organisme l’ayant précédemment subventionné ne sera pas un Etablissement public à caractère administratif, ou est qualifié « d’établissement public à prérogatives d’Etablissement public industriel et commercial, au sens des dispositions de l’article 112 de la Loi de 2011 ».

Il conviendra également dans ce cas soit d’obtenir l’accord du Commissaire du Gouvernement et du Contrôle d’Etat, le contrôle économique et financier et à défaut d’accord, d’envisager de modifier la Convention constitutive dans le sens d’une suppression de ces deux formes de contrôle qui ne sont pas obligatoires, en application des dispositions des articles 114 et 115 de la loi de 2011.

En application du décret de 2012, il peut être mis fin à la présence du commissaire du Gouvernement auprès du groupement à tout moment par les autorités chargées de l'approbation de sa convention constitutive.

Ces modifications et le principe de la transformation sont normalement approuvés par l'assemblée générale des membres du GIP. Or, il peut arriver que le GIP ne dispose que d’un conseil d’administration qui remplace l’assemblée générale, au sens de sa Convention constitutive Ainsi l’organisation actuelle du GIP et notamment l’absence d’assemblée générale paraîtront dans ce cas en décalage avec la Loi, ce qui pourra être encore un prétexte pour modifier par nouvel avenant la Convention constitutive[][][][][]

L’approbation de l’Avenant devra être donnée par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre de la santé, dans les conditions prévues par décret n° 2012-91 du 26 janvier 2012 relatif aux groupements d'intérêt public qui a abrogé et remplacé le décret n° 88-1034 du 7 novembre 1988 relatif aux groupements d'intérêt public constitués dans le domaine de l'action sanitaire et sociale et portant mesures réglementaires d'application du chapitre II de la loi du 17 mai 2011

Aux termes de ce décret, « Le défaut d'approbation expresse, à l'expiration d'un délai franc de quatre mois à compter de la réception par l'administration des documents et informations …, vaut refus d'approbation de la convention constitutive d'un groupement d'intérêt public »

En somme la transformation d’un GIP en Fondation ou autre groupement de nature privée ne devrait pas rencontrer de difficultés insurmontables.

Dans le cas contraire, il paraît encore possible de recourir à la procédure alternative qui suit.

 

La création d’une Fondation, suivie postérieurement de la dissolution naturelle du GIP, sans dévolution totale de son actif net à la Fondation, est une procédure alternative possible

 

La dissolution du GIP, d’après sa Convention constitutive et l’article 116 de la loi du 17 mai 2011, peut généralement avoir lieu selon trois hypothèses :

1° Par l'arrivée du terme de la convention constitutive dans le cas où la convention a été conclue pour une durée déterminée et où elle n'est pas renouvelée,

2° Par décision de l'assemblée générale (ou le conseil d’administration),

3° Par décision de l'autorité administrative qui a approuvé la convention constitutive, notamment en cas d'extinction de l'objet.

Une dissolution anticipée (cas 2° ou 3°) nécessiterait une modification de la Convention constitutive, notamment en ce qu’elle prévoit la dévolution de ses biens à une entité publique, ainsi qu’une décision favorable des deux ministères précités.

Au contraire, l'arrivée à terme de la Convention constitutive, dans le cas où la convention a été conclue pour une durée déterminée et où elle n'est pas renouvelée, ne suppose aucune décision particulière, ni intervention d’un arrêté des ministères de tutelle. La dissolution sera suivie de la liquidation avec dévolution des actifs restant à une personne publique.

Aussi la création préalable d’une Fondation pourra-t-elle dans un premier temps préalablement être décidée et dotée d’une partie des actifs du GIP, en laissant à celui-ci la part de ses actifs dont l’origine publique justifierait une rétrocession aux personnes morales de droit public l’ayant précédemment subventionné, lors de la dissolution ultérieure naturelle.

Une telle décision nécessite une délibération de l’Assemblée générale ou, à défaut, du Conseil d’administration.

Le délai d’instruction de la demande de reconnaissance d’utilité publique de la Fondation est de l’ordre d’une année, aboutissant à un décret du Premier Ministre après avis du Conseil d’Etat, Section de l’intérieur.

En revanche, la création d’un Fonds de dotation pouvant temporairement recevoir et porter des actifs du GIP dans l’attente de l’aboutissement de la procédure de création de la Fondation, nécessite un délai de trois à huit semaines et présente de ce fait l’avantage de la rapidité.

 

En somme, la substitution d’une Fondation privée à un GIP paraît possible, soit par transformation directe, soit par dissolution du GIP précédé de la dévolution de tout ou partie de son actif net à une fondation créée par reconnaissance d’utilité publique.

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